10 Juillet 2020
3ème partie
le cerveau et les couleurs
Comme vu lors de la précédente publication, 3x λ «S», «M» et «L» sont captés par la rétine de chaque œil et transformés en impulsions électriques pour être ensuite transmis par le nerf optique au cerveau. Celui-ci va alors combiner les informations pour créer les couleurs.
Le cerveau ne fait pas qu’interpréter les influx en couleur, il corrige également «l’image» qui arrive inversée par l'action du cristallin et partiellement colorée puisqu’il n’y a pas de cône en périphérie de l'oeil ni différence entre l’œil droit et gauche.
J’ai un ami qui est malheureusement atteint d’une dégénérescence maculaire inhibant sa vision centrale, son ressenti visuel est celui d’une (très) forte myopie mais il «voit» au centre, signe que le cerveau est capable de reconstruire des parties manquantes d’un signal visuel. Dans le registre des pathologies, on peut citer également le daltonisme qui est une anomalie affectant un ou plusieurs type de cônes.
Les couleurs complémentaires
Voici deux exemples ludiques qui démontrent la perception des couleurs complémentaires par l’œil.
Ces illusions d’optiques sont provoquées par la saturation d’un canal, le bleu par exemple : après fixation du coeur, au moment ou le fond blanc est regardé, les cônes «S» sont «fatigués» et ne répondent plus correctement, la couleur complémentaire apparaît alors (R+V-B).
En activant ou en inhibant des cellules liées à l’un des trois influx, le cerveau est donc capable de représenter environ 2 millions de couleurs (le nombre est très variable selon les individus).
Autre point fondamental (source éduscol) : l'oeil effectue une synthèse additive des rayonnements reçus. S'il est trichromatique («S»+«M»+«L») la lumière est vue plus ou moins blanche suivant le degré de stimulation. Quand la stimulation est bichromatique deux cas se présentent :
Pour toutes ces raisons le système de perception œil – cerveau est qualifié de "synthèse tri-chromatique additive".
La représentation des couleurs
Le premier schéma ci-dessous représente les résultantes de couleurs par combinaison additive, R+V-B=J, R+B-V=M, V+B-R=C et R+V+B=Blanc.
La compréhension du mécanisme œil – cerveau a permis à l’homme de commencer à le reproduire avec pour objectif la création de machines capables de générer ou d'appréhender la lumière en couleur : TV, LCD, scanner, APN, etc.
Il existe une manière inverse de représenter les couleurs (par soustraction donc). Prenons l'exemple d'une feuille de papier: lorsque aucune encre couleur n'est projetée le support est blanc et si toutes les couleurs sont mélangées sur la même surface la résultante est noire. Les couleurs primaires et complémentaires sont inversées en quelque sorte : on combine le Cyan, le Magenta et le Jaune pour restituer du Rouge, du Vert et du Bleu.
A noter que dans la pratique, l'impression «CMJ» ne permet pas d’obtenir de beaux aplats noir, cette encre est donc ajoutée, raison pour laquelle l’acronyme historique utilisé pour l’impression couleur est «CMJN».
4ème partie
les espaces colorimétriques
Pour normaliser la définition de référentiels théoriques de quantification des couleurs, la commission internationale de l’éclairage (CIE) est fondée en 1913 (elle succède à la commission internationale de la photométrie créée 13 ans plus tôt).
Au fur et à mesure que les scientifiques comprennent la façon dont nous percevons les couleurs, la société moderne s’attache à définir des techniques et formaliser des modèles qui vont permettre de reproduire précisément une teinte donnée. La démarche est complexe car le processus humain de perception des couleurs est lui aussi complexe, quelques exemples supplémentaires :
L'espace CIE RGB
C’est l’un des premières tentatives de quantification colorimétrique qui définit une couleur par des coordonnées trichromatiques. Le principe est de mimer le tristimuli humain : une couleur est identifiée dans un repère tridimentionnel orthonormé par 3 vecteurs (un par couleur primaire) pondérés chacun par une "intensité". Le blanc de référence est la somme des λ chacun multiplié par un facteur de pondération de luminance :
On trouve plus d'informations sur cette page. CIE RGB est assez contraignant de par la nature des calculs à effectuer, facteur aggravant : les fonctions colorimétriques peuvent avoir des valeurs négatives (cf. ci-dessous).
Le modèle CIE xyz
Un nouvel espace «xyz» est créé en 1931 pour s'affranchir des contraintes du modèle RGB de sorte que les fonctions colorimétriques résultantes sont toutes positives ou nulles. C'est le premier modèle pérenne de système de correspondance des couleurs. Au lieu de tenter de décrire les couleurs en tant que telles, il définit quelle combinaison de λ apparaît comme étant une couleur une donnée pour la plupart des gens la visionnant, il s’agit donc d’un référentiel. Ainsi, plutôt que d’avoir un système très complexe qui serait capable de projeter n’importe quel λ visible, on obtient une perception similaire en combinant 3 systèmes plus simples capables de projeter chacun une des couleurs primaires (et d’en faire varier sa luminance).
Comme le modèle CIE xyz est tri-dimensionnel, pour en faciliter la représentation et la manipulation l’idée fût de retirer la variation de la luminance du référentiel (un rouge foncé et un rouge clair ont donc les mêmes coordonnées). On obtient ainsi une représentation bi-dimensionnelle dans lequel on ne quantifie plus une une couleur mais une chromacité. La tranche choisie est celle dont la luminance de l’ensemble des couleurs est à 50 %. CIE xyz donc est une représentation graphique directe du signal perçu par l'oeil humain pour chacun des 3 canaux RGB.
Les autres modèles du CIE
Ce modèle particulièrement sophistiqué est implémenté dans le logiciel Rawtherapee).
Le modèle TSL
Imaginé par Computer Graphics dans les années 1970, le modèle Teinte-Saturation-Luminosité propose une approche originale alternative au RGB. Grâce à sa représentation en globe il se maîtrise facilement, c'est la raison pour laquelle on le retrouve dans plusieurs grand logiciels de traitement des photos couleurs. TSL est utilisé pour les caméra de surveillance (créé pour détection de visage) et aussi dans l'industrie pornographique. Destiné à embrasser l'ensemble du spectre de ces couleurs, il dépasse celui de la vision humaine.
La mise en oeuvre informatique
Les logiciels de traitement de la couleur s'inspirent directement de ces modèles normalisés pour construire leurs modules de correction des couleurs :
RGB/TSL de XnViewMP, L*a*b* de ART et CAM02 de Rawtherapee
Cette revue des modèles colorimétriques clot cette deuxième publication. Le prochain article aborde les techniques de gestion de la fidélité des couleurs des outils photographiques et informatiques.
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